QUATRIEME SECTION

LA PRESENTATION AU TEMPLE
ET LA VIE CACHÉE

QUINZIÈME JOUR

La présentation de l’enfant
Jésus au Seigneur.

MÉDITATION

Plan de la méditation. — Dans cette première méditation consacrée à ce grand mystère de la vie cachée du Sauveur, nous méditerons successivement l’entrée de Jésus dans le temple ; sa présentation au Seigneur ; et le sacrifice fait par Marie.

« Tulerunt ilium in Jerusalem, ut sisterent eum Domino. » (Lc 2, 22)

Ils le portèrent à Jérusalem, pour le présenter au Seigneur.

1er PRÉLUDE. — D’après la loi juive, la mère d’un fils premier-né, devait, après quarante jours, présenter à Dieu son enfant et offrir pour elle-même avec un agneau d’un an, destiné à un holocauste, le petit d’une colombe ou une tourterelle, qui restait aux mains du prêtre. Les pauvres pouvaient remplacer l’agneau par une seconde tourterelle. L’offrande du premier-né symbolisait le domaine de Dieu sur les personnes et les biens. Dans la cérémonie, on le rachetait moyennant quelques pièces d’argent ; et la tribu des lévites vaquait à sa place au service du Très-Haut.

2e PRÉLUDE. — Représentons-nous la route, de deux lieues environ, qui séparait Bethléem de Jérusalem ; puis le temple du Seigneur.

3e PRÉLUDE. — Demandons la grâce d’imiter Notre-Seigneur et sa sainte Mère dans leur entière générosité envers Dieu.

I — JÉSUS PORTÉ AU TEMPLE

I. — Voyons les deux saints époux s’acheminer, modestement vêtus, de la maison du pain à la ville de la paix (Bethléem, nous l’avons dit, signifie maison du pain, tout comme Jérusalem se traduit ville de la paix.). Marie porte Jésus ; saint Joseph les accompagne : dans son regard se lit à la fois la tranquillité d’une âme pure et l’attentive sollicitude d’un époux et d’un père. Ils s’avancent recueillis. Avec quel amour maternel la Sainte Vierge presse contre son sein l’Enfant-Dieu ! Leur départ de Bethléem et leur entrée à Jérusalem n’excitent nullement la curiosité. Ils partent, arrivent inaperçus. Et cependant quelles grandes choses vont s’accomplir !

Voici la première entrée de Notre-Seigneur à Jérusalem et dans le temple. Cet édifice, d’abord moins glorieusement relevé de ses ruines qu’il n’avait été bâti par Salomon, va recevoir un inestimable honneur, prédit par le prophète (Ag 2 8-10 ; Ml 3, 1), et qui doit l’exalter au-dessus du temple primitif. Comme Dieu nous confond, par la simplicité même avec laquelle il réalise les plus grands desseins ! Et cette cérémonie, où tout au dehors va se passer selon l’ordinaire, quelle valeur n’a-t-elle pas aux yeux de Dieu, et quelle n’est pas son influence sur le genre humain !

II — 1. Apprécions-nous assez l’honneur que nous fait l’hôte divin, quand, sans aucune solennité, Il fait son entrée dans le temple de notre cœur ? Sachons réveiller notre foi.

Les mêmes actions extérieures ont les valeurs les plus inégales, suivant notre intention et les dispositions intérieures avec lesquelles nous les accomplissons.

II — JÉSUS PRÉSENTÉ AU SEIGNEUR

I. — 1. Celui qui s’offre est un premier-né ; mais non pas un premier-né quelconque ; il est le premier-né de toute créature ; il est le chef du genre humain. Pour emprunter ici les pensées et les expressions mêmes de BOURDALOUE, son oblation est comme un tribut universel pour toutes les nations et tous les peuples. Il nous représente tous ; et, faisant à notre égard l’office d’aîné, répond à Dieu de Lui et de nous, à moins que nous n’ayons l’audace de Le désavouer, et que nous ne soyons assez aveugles pour nous détacher de Lui. En Lui tous les êtres réunis rendent aujourd’hui à Dieu le devoir de leur soumission ; par son obéissance, Il remet sous l’empire de Dieu tout ce que le péché en avait soustrait (Second sermon sur la Purification de la Vierge).

Que son oblation est parfaite ! Saint Paul nous a traduit la disposition de son cœur. « Les holocaustes de l’ancienne Loi, n’ont pu vous plaire. Alors j’ai dit : Me voici, ô mon Dieu, pour faire votre volonté (He 10, 8-9) ! » Et où tendait cette volonté ? Au salut du genre humain par la mort sur la croix !

II — 1. Empressons-nous de ratifier complètement l’offrande faite en notre nom par notre Frère aîné.

Comprenons aussi que les offrandes intimes du cœur ne sont pas sans valeur devant Dieu. Assurément, quand une bonne œuvre se présente à faire, un souhait intérieur ne saurait tenir lieu de l’action qui nous est demandée. Ces vœux platoniques ne serviraient qu’à nous tromper, en masquant notre manque de générosité effective. Mais dictées par un sentiment sincère, les oblations intérieures précèdent et préparent les sacrifices réels. « Prenez, Seigneur, dirons-nous avec SAINT IGNACE, ma liberté tout entière : mon intelligence, ma mémoire et toutes mes facultés, tout ce que j’ai et tout ce que je possède. Tout est à vous, disposez-en à votre gré. Donnez-moi votre amour et votre grâce ; et je suis assez riche. Je n’en demande pas davantage (Livre des Exercices. Contemplation pour acquérir l’amour de Dieu) ».

III — JÉSUS PRÉSENTÉ PAR MARIE

I. — 1. Quelqu’un s’unit intimement à cette oblation du Sauveur ; et s’y unit, non pas seulement comme créature humaine, avec le Chef commun de toute l’humanité, mais comme ayant, dans la personne de ce Chef, un sacrifice spécial à faire. C’est sa Mère, Marie. Elle offre à Dieu son fils unique ; elle l’offre pour que Dieu en dispose selon son bon plaisir et pour notre plus grand bien.

Saint Pierre à célébré le sacerdoce royal de tout fidèle, appelé à offrir à Dieu les hosties spirituelles de ses hommages et de ses actes (1 Pe 2, 5-9). Quel n’est pas le sacerdoce royal de Marie, tenant dans ses bras le Fils de Dieu, qui s’immole en esprit pour le salut du monde !

2. Admirons la vocation de la Sainte Vierge. Et apprenons d’elle à exercer notre sacerdoce, en sacrifiant à Dieu ce que nous avons de plus cher. Rien ne grandit l’homme comme un généreux sacrifice. Platon lui-même n’avait-il pas placé dans cette immolation la consommation de la justice ?

II. — Malgré la réalité de son oblation, Jésus veut cependant que la cérémonie légale du rachat soit observée à son sujet. Celui qui devait nous racheter tous, est rendu à sa Mère au prix de quelques sicles. Rendu à sa Mère, Il l’était à nous-mêmes : il devait être nôtre aussi, tout en étant à Dieu.

Nôtre, Il veut l’être en effet, et Il le sera toujours, si nous voulons bien, à notre tour, assumer la petite part de sacrifices nécessaire pour que ses mérites nous soient appliqués ; Il sera nôtre, dans la mesure où nous accomplissons ce que Dieu nous demande pour être justes et saints.

COLLOQUE

Un fervent colloque nous unira au sacrifice de Jésus et de Marie ; offrons à Dieu toute notre bonne volonté. Ave Maria !