LES SAMEDIS DE LA VIERGE MARIE
LES GRÂCES DE MARIE

SECONDE SECTION

LES VERTUS DE LA MÈRE DE DIEU

SEIZIÈME SAMEDI

Les progrès spirituels de la Mère de Dieu.

Plan de la méditation. — Avant de passer en revue les principales vertus de la Sainte Vierge, il nous paraît aussi intéressant que profitable de jeter un regard d’ensemble sur son avancement spirituel. Marie pouvait progresser, nous l’avons vu ; Marie progressa, ne cessa de progresser, nous n’en doutons pas. Quels sont les lois, les occasions, les instruments de ce progrès ? Question belle et pratique pour nous ! Voyons donc successivement les grandes étapes de la sanctification de la Mère de Dieu, et les moyens dont elle s’est servie pour les parcourir glorieusement.

MÉDITATION

« Quae est ista quae progreditur quasi aurora consurgens ? » (Ct 6, 9).

Quelle est celle-ci, qui monte comme l’aurore à son lever ?

1er PRELUDE. — Considérons encore la Sainte Vierge dans sa maison de Nazareth, le principal théâtre de sa sanctification.

2e PRELUDE. — Demandons la grâce de joindre à une admiration croissante pour la Mère de Dieu une parfaite correspondance aux grâces qui nous sont offertes à nous-mêmes.

I. — LES GRANDES ÉTAPES
DE LA SANCTIFICTION DE LA MÈRE DE DIEU

I. — 1. Dans la marche rapide et continue de Marie vers une perfection de plus en plus achevée, la tradition ecclésiastique nous autorise à distinguer des époques ou moments marqués par un avancement spirituel extraordinaire.

De date fort ancienne (Voyez la très pieuse épître du pseudo-Jérôme à Paula et à Eustochie, n. 7 (VIIIe siècle). Migne, P. L., t. 30, col. 129.), on a divisé, à ce point de vue, la vie de la Sainte Vierge en deux grandes périodes, l’une antérieure, l’autre postérieure à la Maternité divine. La première sanctification caractérise une période de préparation et de disposition. Pour rappeler une comparaison d’usage fréquent dans la littérature sacrée, Marie est alors la blanche laine qui s’apprête à s’empourprer du sang de l’agneau. Sa grâce est, durant tout ce temps, modelée sur le type commun de notre grâce, qui est celle des enfants adoptifs ; elle s’en distingue seulement par une extraordinaire abondance. La seconde sanctification coïncide avec le moment de sa maternité. Intimement rapprochée de la victime sacrée, la laine en prend les vives couleurs. Marie atteint la perfection qui résulte d’une union spéciale avec le Verbe et relève d’un type nouveau, accompli en Jésus-Christ : Celui-ci, outre l’infinie sainteté de la nature divine, possède encore une sainteté qui lui est propre, constituée par l’indissoluble union de sa nature humaine avec sa Personne.

Riche de cette double sanctification, Marie marche de progrès en progrès, jusqu’à la consommation de sa perfection dans la gloire, où elle est mise en possession de sa fin.

Et la route est jalonnée d’événements sanctifiants : les grandes épreuves, dont le type est le Vendredi Saint, et les grandes consolations, dont le type est la Pentecôte.

II — La grande distance qui nous sépare de Marie n’empêche pas des applications analogiques. Entre le premier et le dernier instant de notre vie chrétienne, se trouvent placées des étapes intermédiaires. Du baptême, nous sommes conduits jusqu’à la réception de l’Eucharistie. À partir de ce moment, les visites fréquentes du Christ, prolongées dans les admirables effets de la charité qu’elles sont venues entretenir et développer, constituent une présence moralement permanente, destinée à donner comme une forme nouvelle à notre sanctification. On s’engage ensuite dans un état de vie. Même celui que choisissent la plupart des hommes, le mariage, est inauguré, pour le chrétien, par un sacrement, et lui offre des moyens spéciaux de sanctification. Que dire de l’entrée dans la vie religieuse, de la réception du sacerdoce ?

Époques de sanctification encore, certaines grandes épreuves, ruines de projets humains, sur lesquelles l’édifice spirituel s’élève plus beau et plus pur ; et certaines grandes consolations, qui, acceptées humblement et filialement, viennent à propos nous animer à plus de confiance et de courage.

Tandis que nous bénissons Dieu des multiples attentions de sa Providence, n’avons-nous pas à regretter le peu de profit que nous en avons retiré ? Ne nous décourageons pas ; mais que les dommages passés nous rendent d’autant plus avares pour l’avenir !

II — LES MOYENS DE SANCTIFICATION DE LA MÈRE DE DIEU

I. — 1. Observons d’abord que Marie se sanctifia en tout lieu et en toute occasion : au temple, à Nazareth, à Bethléem, à Cana, près de la Croix, au Cénacle ; dans les événements heureux et les plus grandes infortunes.

Quelle erreur donc, déjà signalée par l’Imitation ( L. I, c. 9 et 1. 3, c. 27.), d’attendre, pour nous sanctifier, un autre milieu et un autre entourage de personnes, d’événements ou de choses ! Les saints ont vécu sous tous les climats et dans les circonstances les plus variées. Combien il est plus utile de bien se persuader qu’il n’y a ni lieux ni événements qui ne possèdent un côté sanctifiant, et de prendre généreusement toutes choses par ce côté !

Les moyens de sanctification dont se servit la Sainte Vierge se ramènent tous au bon usage des sacrements et à la pratique de toutes les bonnes œuvres que Dieu désirait d’elle. Ces bonnes œuvres consistaient, avant tout, dans le fidèle accomplissement de tous les devoirs légaux. Marie ne s’exempta d’aucune prescription de la loi ancienne. C’étaient ensuite toutes les bonnes actions qu’une parfaite volonté de bien faire lui dictait sous l’influence de la grâce et la direction du Saint-Esprit.

II — Tout programme sérieux de sanctification doit se modeler sur celui de Marie. Nous avons à bien recevoir les sacrements ; nous avons à multiplier nos actions méritoires. Que de chrétiens se déclareraient décidés à suivre les inspirations divines, s’ils avaient le moyen de les reconnaître ! Mais ils ont le tort d’attendre je ne sais quelle voix miraculeuse qui vienne de la part de Dieu leur parler à l’oreille ou au cœur. Pour les choses de la perfection, ils versent dans une erreur analogue à celle du mauvais riche : ils ne seraient pas loin de souhaiter qu’un bienheureux habitant du paradis leur fît, sous une forme visible, une visite personnelle pour leur communiquer les désirs du Très-Haut. « Oubliez-vous donc, leur dirait Notre-Seigneur, que mon Évangile et mon Église vous enseignent mes volontés ? » Ne sont-ce pas des inspirations certaines que celles-ci :

L’inspiration d’obéir à toute loi juste, à tout commandement légitime. Qui veut cette obéissance, si ce n’est Dieu ? et Il la veut entière, prompte et joyeuse. Obéir en rechignant et comme à contre-cœur, c’est doubler la peine et diminuer le mérite.

L’inspiration d’accomplir toute bonne action qui raisonnablement paraît à notre portée. Le commencement de chacune d’elles se trouve dans une grâce prévenante qui éclaire l’intelligence et excite la volonté. N’est-ce pas là l’inspiration ?

Tout en évitant de s’inquiéter scrupuleusement pour des minuties, l’inspiration de consacrer à toute bonne œuvre un soin diligent. Qui peut douter que tel ne soit le bon-plaisir divin ?

Rares sont peut-être les mouvements extraordinaires d’en haut. Mais si Dieu daigne nous en réserver, notre docilité aux grâces quotidiennes nous rendra prompts à seconder ses faveurs plus spéciales. Par cette route d’une entière fidélité, notre avancement sera rapide et sûr.

COLLOQUE

Repassons en esprit l’histoire de notre sanctification. À côté de moments heureux dont nous bénirons Dieu, que d’autres sont marqués par des maladresses pratiques, résultant de notre peu de confiance et du manque de générosité ! Offrons à Marie et à Jésus un programme nouveau, dont ils daigneront accepter l’hommage et hâter la réalisation. Ave Maria !