LES SAMEDIS DE LA VIERGE MARIE
LES GRÂCES DE MARIE

VINGTIÈME SAMEDI

La foi de la Mère de Dieu :
Les triomphes de cette foi.

Plan de la méditation. — Des épreuves de la foi, nous passons à ses victoires. La foi nous donne un triple triomphe : dans la grâce qu’elle nous obtient, dans la supériorité qu’elle nous donne sur le temps présent, et dans la vision béatifique dont elle est la préparation. Tels seront les trois points de cette méditation.

MÉDITATION

« Per fidem vicerunt régna, adepti sunt repromissiones. » (He 11, 33).

La foi conquiert des royaumes, assure l'effet des promesses.

1er PRELUDE. — Représentons-nous la demeure de Zacharie, et la chambre où a lieu l’entrevue de Marie et de sa cousine Élisabeth. Élisabeth proclame Marie bienheureuse d’avoir cru à l’accomplissement des paroles de Dieu.

2e PRELUDE. — Demandons instamment la grâce d’acquérir une conviction intime de la grandeur inappréciable qu’une foi vive garantit à notre existence.


 

I. — LA FOI, PRINCIPE
D’UNE GRÂCE TRIOMPHALE

I. — 1. Dieu, avant d’accorder des grâces particulières, a coutume d’exiger un grand acte de foi. Dans l’Ancien Testament, Abraham dut croire que le fils qu’il allait sacrifier serait l’héritier des promesses. Tout le long de sa vie mortelle, Notre-Seigneur demande la foi avant de faire ses plus grands miracles. Le défaut de foi met obstacle aux prodiges, l’intensité de la foi triomphe des impossibilités. Serait-il dérogé à cette loi dans l’histoire des exaltations de la Sainte Vierge ? Nullement. Quand Il va lui conférer la suprême dignité de Mère de Dieu, au moment d’étaler à ses yeux une perspective autrement magnifique et glorieuse que celle qui découvrit au patriarche les conquêtes de son innombrable postérité, avant de lui dévoiler une bénédiction dont l’humanité entière profiterait par elle, Dieu lui propose à croire ces choses inconcevables : elle deviendra mère en restant vierge ; et le fils que, pauvre jeune fille, elle mettra au monde, sera le glorieux héritier en qui toutes les promesses vont s’accomplir ! Dieu veut que Marie soit la toute première à remplacer la foi au Rédempteur promis par la foi au Rédempteur conçu et né d’elle ! Suivant le langage des Pères, l’enfantement spirituel par la foi précédera en Marie l’enfantement corporel du Sauveur du monde (Cfr S. AUGUSTIN, Enchiridion, n. 34 (M. P. L., t. 40, col. 249) ; S. BERNARD, Sermo 3 in nativitate Domini, n. 4 (M. P. L., t. 183, col. 121).).

Dieu exige encore une foi persévérante malgré les apparences contraires. Abraham dut continuer de croire en sa vocation et en celle d’Isaac, même quand il tira le glaive pour immoler ce fils de prédilection. Combien la persévérance de Marie fut plus éclatante ! Sa foi à la royauté glorieuse de son fils traversa intacte les années si obscures de l’enfance et de l’adolescence de Jésus, les contradictions de la vie publique du Sauveur, elle traversa les souffrances et les humiliations infinies de la passion et même de la mort sur la croix.

II — À notre tour, nous sommes invités par Dieu à traduire notre foi en actes, nous sommes spécialement sollicités aujourd’hui à croire en Jésus, Verbe incarné et Sauveur du monde ; et il nous faut persévérer dans cette foi, malgré les dénégations que les incrédules élèvent au nom d’une prétendue science, et même malgré les démentis apparents de l’histoire humiliée de l’Église. Devant nous s’étend également une terre de promission plus belle que celle qui fut montrée à Abraham. Nous ne la conquerrons qu’au prix d’une foi ferme et constante.

II. — LA FOI, PRINCIPE DE SUPÉRIORITÉ

I. — 1. Il est beau d’être au-dessus des maux de cette vie ; il l’est peut-être davantage de se montrer supérieur à la bonne fortune. La foi assure l’une et l’autre supériorité. Saint Paul décrit et chante ces victoires de la foi en son chapitre onzième de l’épître aux Hébreux. « Par la foi, dit-il, Abraham se mit en aveugle sous la conduite de Dieu ; Sarah crut qu’elle serait mère malgré son âge avancé ; Abraham tint que son fils immolé hériterait les promesses ; la foi fit passer les vrais Israélites en étrangers sur cette terre, dans l’attente d’une cité meilleure ; la foi fit préférer à Moïse de partager les souffrances de son peuple plutôt que les délices de la cour des rois d’Égypte ; par la foi furent acceptées toutes les privations et les souffrances du temps présent. » Bref, l’Apôtre reconnaît à la foi un perpétuel triomphe sur l’attrait des biens présents, sur les craintes des maux de cette vie, grâce à la perspective des biens futurs ; la foi soutient le courage et l’espérance alors que tout paraît perdu.

2. Voyons cette magnifique supériorité dans notre Mère. Dès avant la naissance du Messie, la foi la porte à mettre l’honneur de la virginité au-dessus de toutes les joies de la maternité et de la famille ; la rend capable de supporter tous les sacrifices et le martyre intérieur réservé à la Mère de Dieu ; elle affermit son courage au milieu des épreuves de toute sa vie.

II. — La foi est-elle pour nous un principe de victoires ? Tous les jours nous offrent des occasions, petites ou grandes, de renoncements méritoires ; sans quelque abnégation, nous-mêmes nous ne saurions ni nous recueillir, ni prier, ni nous dévouer, ni être charitables et généreux, ni accomplir tout le programme d’une vie parfaitement chrétienne. N’y a-t-il pas encore de légères souffrances, et surtout de fréquentes humiliations personnelles à endurer, ou des humiliations publiques à partager comme catholiques, prêtres, religieux ? En toutes ces rencontres, les bras nous pourraient tomber de lassitude et de découragement, si une foi vive ne nous maintenait debout.

III. — LA FOI, PRÉPARATION
DE VISION ÉTERNELLE

I. — La foi, lumière de la vie présente, prépare la vision des cieux.

1. Lumière de la vie présente, quel jour elle projette sur les événements de notre vie ! Ce que nous sommes et ce que nous devons faire, la foi nous l’explique. Elle nous donne la clef du grand problème soulevé par les maux de cette vie et même par les biens. Elle nous renseigne sur notre présent et même sur notre avenir. Elle supplée, en fait, à cette impuissance morale où se trouve la seule raison pour découvrir avec assez de certitude et assez pleinement toute la chaîne des devoirs qui nous relient à Dieu et à notre fin. Pour nous en convaincre, il suffit d’accorder un instant d’attention à l’état d’âme de ceux qui ont abandonné la foi. Profitant, pendant un certain temps, de l’habitude des idées chrétiennes, ils ont pu nourrir l’illusion de construire eux-mêmes un édifice moral raisonnable, qu’ils modelaient sur la religion chrétienne. Mais petit à petit, ces vestiges se sont affaiblis. Et, à l’heure présente, quelle conviction demeure entière dans leur esprit, quel devoir subsiste à leurs yeux, quelle réponse peuvent-ils donner au problème angoissant de la destinée humaine ? Tout est chez eux controverse, hésitation, obscurité.

2. Elle prépare la vision des deux. Assurément d’autres conditions sont encore requises ; mais celle de la foi est indispensable. « La foi, dit SAINT AUGUSTIN (Sermon 48, c. 1, n. 1 (M. P. L., t. 38, col. 254). Sur les rapports de la foi et de l’intelligence, voyez S. AUGUSTIN, libr. un. XLVII Quaestionum in S. Matthaeum, n. 38 (M. P. L., t. 35, col. 1330 s.).), vous fait croire ce que vous ne voyez pas ; elle vous mérite de voir ce que vous croyez. » Et à ce point de vue, il proclamait Marie plus heureuse d’avoir, par la foi, conçu le Christ dans son cœur que de l’avoir porté dans son sein (De la Sainte Virginité, 1. i, c. 3. (M. P. L., t. 40, col. 397).). Certes, en contemplant Marie au faîte du bonheur céleste, nous pouvons lui dire comme Élisabeth : Oh ! heureuse êtes-vous d’avoir cru !

II — Que ces considérations nous disposent, avec la grâce de Dieu, à croire d’une foi de plus en plus vive. Remercions vivement le Seigneur de nous avoir conservé la foi.

COLLOQUE

En félicitant Marie de sa foi, demandons-lui de la partager, et d’être de ces grands chrétiens qui se font gloire d’offrir à leur Sauveur et à leur Dieu une foi d’autant plus entière, qu’elle est plus contredite et plus reniée. Ave Maria !