LES SAMEDIS DE LA VIERGE MARIE
LES GRÂCES DE MARIE

VINGT-SIXIÈME SAMEDI

L’espérance de la Mère de Dieu :
Les fruits de cette espérance.

Plan de la méditation. — L’espoir remplit notre vie présente de confiance, et assure, dans l’avenir, le bien espéré. Ces deux grands fruits achèveront, avec la grâce de Dieu, de nous animer « d’une espérance invincible. Nous les considérerons l’un après l’autre dans les deux premiers points ; le troisième nous montrera ces fruits recueillis par la Sainte Vierge.

MÉDITATION

« Spes non confundit. » (Rm, 5, 5).

L'espérance ne trompe point.

1er Prélude. — Voyons la salle où se trouvent assemblés les convives des noces de Cana.

2e Prélude. — Demandons instamment la grâce de pouvoir, par la miséricorde de Dieu et l’intercession de notre bonne Mère, cueillir les fruits magnifiques de l’espérance chrétienne.

I. — LE FRUIT DE CONFIANCE

I. — Prix de la confiance. 1. Voici un malade, vaincu par l’infir­mité et la douleur. Survient un médecin de grande réputation. Après examen, il déclare que le mal est curable, et découvre au patient la perspective même éloignée de la convalescence et de la santé. Aussitôt, une révolution intérieure s’accomplit chez le malheureux. Le courage est revenu avec la conviction que la lutte contre la maladie n’est pas inutile ; la lumière apparue dans l’avenir a changé l’aspect des choses : le mal lui-même, la douleur actuelle sont devenus plus tolérables, se concilient même avec une secrète joie que fait naître l’attente du rétablis­sement. Cette transformation est l’œuvre de la confiance. Et la confiance, appuyée sur Dieu, est fille aînée de l’espérance. Elle est, en effet, la certitude tranquille d’une espérance qui a grandi (Voyez S. Thomas, 2, 2. q. 128, art. 1, ad 6.).

2. Ce malade, c’est l’humanité, c’est chaque homme en particulier, infirme par le désir, les passions, la volonté, autant que par la faiblesse du corps. Et Jésus, c’est le médecin annon­çant la fin des maux. Heureux qui se laisse persuader ! Aussitôt sa vie et lui-même se transforment : il a la volonté de lutter et de vaincre ; il devient capable de supporter les peines ; il demeure calme, rassuré devant la menace et dans le péril.

La confiance fait jouir d’une paix plus délicieuse que tout sentiment (Ph 4, 7), et elle conduit encore à la vertu la plus héroïque. Souvenons-nous de ce lien qui relie la confiance à la sainteté. Sans confiance, comment déployer cette activité généreuse, comment accomplir ces renoncements continuels et absolus que suppose la sainteté ? Mais d’autre part, les biens promis par la foi sont si magnifiques, éclipsent tellement toutes les choses présentes, que lorsqu’une vive confiance nous les fait comme tenir dans la main, plus rien ne nous coûte pour en assurer la possession définitive, au degré qu’espèrent les saints.

II. — Oh ! laissons-nous gagner aux charmes si précieux d’une douce confiance, et abandonnons décidément un pessimisme aussi stérile que sombre ! Il y a plus de noblesse et plus de générosité à sourire à la vie et à tous ses devoirs, qu’à bouder les hommes et les choses.

Veillons également à inspirer confiance aux autres. Donner confiance, c’est multiplier les hommes heureux.

En même temps retenons cette vérité : La vertu initiale est pénible ; le progrès et le développement de la vertu donnent le bonheur. Qu’ils se trompent ceux qui prétendent être saints à demi ! Ils restent comme engagés dans les broussailles, sans parvenir à la clairière ; dans la guerre spirituelle, ils soutiennent la lutte sans jamais donner de ces coups décisifs qui font fuir l’ennemi.

II — LE FRUIT ÉTERNEL

I. — L’espérance a pour objet propre des richesses infinies. Quel fruit meilleur pourrait-elle donc porter ? Que l’espérance me donne mon Dieu et son bonheur : puis-je désirer, rêver davantage ? Ne serai-je pas au comble de tous mes vœux ?

Eh bien ! l’espérance réalise son objet. L’apôtre ne le dit-il pas clairement ? « L’espérance ne confond point ». Eh quoi ! dans la charité même que l’Esprit-Saint a répandue dans nos cœurs, ne tenons-nous pas les arrhes de la félicité que Dieu nous destine ? (Spes autem non confundit, quia caritas Dei diffusa est in cordibus nostris per Spiritum Sanctum qui datus est nobis. Rm, 5, 5.) « Parce qu’il a espéré en moi, dit encore l’Écriture, je le délivrerai » (Ps 90 14). Espérer, c’est en quelque sorte légalement engager la loyauté divine : elle ne saurait nous trahir.

Mais enlevez à l’homme l’espérance : par quelle route inconnue et souterraine va-t-il parvenir aux biens du ciel ?

II — Gravons bien dans nos cœurs les immenses dommages que cause toute désespérance, et le trésor éternel promis à qui veut espérer. Quel parti plus inutile et plus funeste que celui du découragement ?

III. — LES FRUITS DE L’ESPÉRANCE DE MARIE

Quelle confiance produisit l’espérance de Marie, et comme elle la mit en possession des biens espérés !

I. — La confiance. La confiance de Marie éclate dans les traverses au milieu desquelles son cœur demeura calme et ferme.

1. Elle eut confiance que sa virginité ne souffrirait aucun détriment de son union avec saint Joseph. Une confiance analogue nous doit accompagner dans les dangers nécessaires courus pour le service de Dieu. Ainsi le recueillement n’aura pas à souffrir d’un apostolat véritable. Mais ne confondons pas les occasions dangereuses qu’impose la nécessité et celles qu’on affronte volontairement ; les périls que l’on accepte pour le service de Dieu et ceux où nous conduit notre passion ou notre lâcheté.

2. Marie a confiance que Dieu éclairera le doute si pénible qui tourmente l’âme de saint Joseph, à cette heure d’anxiété où il ne sait s’expliquer la maternité de sa chaste épouse. Des malentendus peuvent faire planer sur nous des soupçons immérités que les saints même n’ont pu toujours éviter dans leur vie. Ayons confiance que Dieu saura en retirer sa gloire et notre bien.

3. Marie, lors de la fuite en Égypte, nous donne un exemple de confiance à imiter dans les persécutions ouvertes auxquelles l’Église ou nous-mêmes nous pouvons être en butte.

4. Marie a confiance aux noces de Cana, malgré le refus apparent que semble opposer Jésus à sa demande d’un miracle. La confiance trouve son application la plus importante et la plus continuelle dans une prière assidue et persévérante.

II — L’objet espéré. Il suffit de contempler cette Reine si glorieuse près du trône de son divin Fils. Ne possède-t-elle pas tout ce que son âme attendait sur le Calvaire ?

Soyons donc à notre tour debout sur le Calvaire de nos épreuves et de nos difficultés, pour tout obtenir par notre espérance elle-même.

COLLOQUE

Repensant à la nature de l’espérance, à ses épreuves, aux tentations contraires, à ses consolations et à ses fruits, nous féliciterons et remercierons Marie d’être pour nous un modèle parfait et une grande inspiratrice d’espérance. Puis, pour répondre à ses bontés, nous demanderons pardon d’avoir douté, d’avoir du moins trop peu espéré ; nous reconnaîtrons ce qu’il y avait d’amour-propre et d’orgueil dans nos manques d’espé­rance, et nous offrirons à Marie, et par elle à Jésus, une vie fondée sur un complet espoir en Dieu. Salve Regina ! Spes nostra, salve ! Salut, ô Reine ! Salut, ô vous, notre espérance !